Le changement de ministres n’arrête par les réformes. Les visions rétrogrades et monolithiques perdurent. Les groupes de niveaux en collège, une vision passéiste
Deux mois après les résultats de Pisa rappelant les difficultés du système éducatif français et malgré les changements de ministres nous continuons de subir la vision d’un président de la République qui a décidé de faire de l’éducation un domaine réservé.
Une réflexion confisquée
La sémantique, le vocabulaire choisis pour parler de la jeunesse et de son projet éducatif interrogent et inquiètent. Il n’est question que d’ordre, d’uniforme, de service national universel. Il va falloir asséner aux enfants de ce pays un choc de savoir et pour ce faire les assigner dès la 6ème à des groupes de niveaux dont on voit mal comment ils pourront en sortir.
Au Sgen-CFDT nous n’avons pas cette vision de l’école.
Depuis plusieurs années tous les personnels voient leur charge de travail augmenter et leurs conditions d’exercice se dégrader. Ils sont confrontés à des populations scolaires fragilisées par la précarité et les effets non pris en compte de la crise sanitaire comme les troubles de santé mentale qui augmentent (Santé Publique France). Ils doivent mettre en musique des réformes dont on cherche le sens et qui s’enchainent souvent sans cohérence. Le tour de passe-passe de la suppression de l’heure de technologie en 6ème est à ce titre éclairant. Supprimée pour financer l’accompagnement, le renforcement en mathématiques et français, ce dispositif à peine mis en œuvre disparaît. Et ce, pour financer en partie les groupes de niveaux.
Il est particulièrement inquiétant de constater (encore) le manque de respect du cadre législatif mais surtout des personnels chargés de mettre en musique une réforme de fond du collège qui ne dit pas son nom. Ces injonctions épuisent les équipes de directions et ne tiennent pas compte de leur expertise et de leur savoir faire.
Alors que l’on sait depuis longtemps que le collège est un parcours douloureux pour les élèves en grande difficulté. Ce ne sont pas les annonces politiques et les moyens engagés qui vont changer cette réalité.
Offrir des remédiations efficientes aux élèves ce n’est pas les assigner pour toute leur scolarité à des groupes de niveaux.
Offrir des parcours diversifiés aux élèves c’est permettre la mixité sociale et scolaire. Et non mettre en place des groupes de niveaux.
Réforme du collège : Un travail empêché
Aujourd’hui il va leur falloir organiser de nouvelles modalités pédagogiques pour les classes de 6ème et 5ème sans cadre réglementaire.
C’est la reconduction en pire de la méthode utilisée l’an dernier avec la suppression de la technologie.
Absence de cadrage
Alors que l’architecture de l’enseignement du français et des mathématiques change, les équipes de direction n’ont que des annonces médiatiques ou un dossier de presse erroné pour travailler avec leurs équipes à sa mise en place.
Les modifications de l’an dernier (soutien et approfondissement en français et en mathématiques en 6ème) imposées avec la même méthode sont à jeter à la poubelle sans évaluer leur pertinence. A présent il faut répartir les élèves dans des groupes de niveaux.
Comment organiser ces groupes de niveaux sans cadrage réglementaire ? D’abord en rognant dans de nombreux établissements sur d’autres choix pédagogiques des équipes depuis plusieurs années (dédoublement en sciences, en langue, jeux d’options pour rendre l’établissement attractif). Ensuite, en construisant ces nouvelles modalités sans concertation et accompagnement.
C’est une nouvelle manière de travailler, discutable du point de vue de la recherche pédagogique. Ce qui bouleversera considérablement le quotidien des élèves et des équipes.
Absence de moyens
Quelles modalités de travail sont envisagées alors qu’il manque :
- des temps de concertation pour l’ingénierie pédagogique que cela implique,
- un accompagnement par les corps d’inspection,
- un temps de formation des enseignants,
- un travail d’articulation entre les programmes et l’évaluation par compétences.
A l’heure, où les équipes discutent de la dotation horaire globale et de sa répartition par discipline, nous n’avons aucune précision sur les horaires et moyens attribués. Nous interrogeons l’administration dans les différentes instances, comité social d’administration départemental ou académique …
Sans compter que le déficit d’attractivité du métier d’enseignant va fragiliser l’architecture de cette réforme. Alors que dans de nombreux endroits il manque déjà des enseignants de français et de mathématiques, comment pourrons nous construire une organisation conforme à la commande ?
Pourtant, les préconisations de Pisa pour faire évoluer le système éducatif sont simples :
- Impliquer davantage les parents d’élèves,
- Développer des processus d’évaluation formatives.
- Former solidement les enseignants.
Le chef de l’État et ses ministres successifs n’en tiennent aucun compte. Les élèves français restent parmi les plus stressés de l’OCDE.
Le Sgen-CFDT dit stop à ces réformes hâtives qui ne sont en rien systémiques.
L’éducation n’est pas un domaine réservé, on ne réforme pas une institution sans ses acteurs.
En savoir plus ?
Vous pouvez :
- Consulter le dossier sur les moyens 2024
- Signer et faire signer la pétition initiée par les cahiers pédagogiques