Personnel de santé, sociaux : quelle place dans le dé confinement?

Le 4 mai 2020, le SNAMSPEN, syndicat des médecins de l'Éducation nationale du Sgen-CFDT, la FSU et l'Unsa ont encontré Jean-Michel BLANQUER, Ministre de l’éducation nationale, Madame PRADEILLE-DUVAL de la DGESCO et Monsieur DELANOE de la DGRH. Compte-rendu.

Audiences et instances
Audience du 4 mai avec le ministère : Personnels Santé sociaux

Les représentants des personnels sociaux et de santé de la FSU, de l’UNSA et de la CFDT se sont exprimés sur les protocoles sanitaires du premier et second degrés parus le 3 Mai 2020.

Retour sur l’expression du SNAMSPEN/Sgen-CFDT lors de l’audience

 

Monsieur le ministre, après les propos de la CFDT déplorant le peu de place fait aux personnels sociaux et de santé dans ces protocoles, a repositionné d’emblée les psychologues, médecins, infirmiers, assistants de service social comme des acteurs de premières lignes quant à l’accompagnement des équipes et des élèves.

Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT, qui s’était prononcé dès le 23 Avril lors d’une audition devant l’Assemblée nationale, pour une réouverture des écoles dans l’intérêt des enfants, sous conditions visant à la sécurité des enfants et des personnels, a noté la qualité et l’exhaustivité des protocoles sanitaires. Cependant il juge la place trop limitée et peu lisible des personnels sociaux et de santé auprès des personnels de direction et des IEN pour accompagner cette reprise.

Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT a fait remarquer l’attente des personnels de santé depuis 2 mois quant à être clairement positionnés dans cette crise sanitaire en tant qu’acteurs de santé, faisant douter les médecins de leur place au sein de cette institution.

 

Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT réclame une feuille de route nationale claire pour chaque personnel et une coordination clarifiée avec les acteurs de l’École, notamment les personnels de direction et IEN, mais aussi avec les ARS, la CPAM, les conseillers en prévention.

L’ensemble des compétences des médecins face à cette crise sanitaire (rappelant celle de la grippe H1N1), qui auraient pu être mobilisées, est énuméré puisque ces compétences semblent ignorées de notre ministère !

Non pas pour réaliser l’ensemble de celles-ci, – jugé utopique par le SNMSU dont l’apaisement du climat scolaire et les PAI sont apparus comme les deux sujets de préoccupation au cours de cette audience – mais pour être enfin sollicités à bon escient dans cette crise sanitaire, pour une expertise concernant les populations scolaires ou plus individuellement les élèves les plus fragiles dont nous nous occupons habituellement.

Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT réclame une feuille de route nationale claire et une coordination clarifiée avec les acteurs de l’École…

Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT a dû préciser la notion de coordination qui pourrait être portée par les médecins devant l’opposition réaffirmée lors de cette audience par les syndicats infirmiers quant à une organisation de type service médical (pour mémoire les médecins scolaires travaillent avec plusieurs collègues infirmier.ères sur un secteur beaucoup plus vaste que le leur). A cette occasion, nous avons pu dire que nos collègues infirmier.ères sont bien plus experts que les médecins dans l’éducation à la santé et l’hygiène, domaines dans lesquels elles sont particulièrement formées. De plus, nous n’avons pas à intervenir dans leurs activités.

Pour les médecins, il y a nécessité de coordonner l’information (et non les personnels), notamment dans le cadre d’une telle épidémie. Il est indispensable de s’assurer dans les bassins de vie, de la transversalité de l’information entre personnels (le « qui fait quoi, pourquoi et quand » …). Ceci pour réagir et communiquer de façon coordonnée rapidement et sur tout un bassin de vie comportant un nombre important d’établissements et d’acteurs.

Pour cela, il faut une feuille de route nationale où médecins et infirmiers sont coordonnés chacun sachant ce qu’il a faire et ce que l’autre a à faire, sans aucune confusion des rôles, sans notion de hiérarchie entre personnels de santé. En ce sens les syndicats infirmiers ont approuvé le SNAMSPEN/Sgen-CFDT.

 

Protocoles sanitaires

Concernant les protocoles sanitaires publiés le 3 mai dernier et pour lesquels nous avons été trop brièvement concertés à partir du 30 avril :

L’hygiène des locaux pour le SNAMSPEN/Sgen-CFDT, reste comme nous l’avions déjà souligné, la première des priorités des cinq fondamentaux de ce protocole : comment les parents peuvent ils s’engager à reprendre l’école sans l’assurance de celle-ci ?

Les règles d’hygiène restent trop succinctes quant au matériel partagé entre élèves (lycées professionnels, TP et maternelles), à contrario des fiches sanitaires élaborées par le ministère du travail pour les ateliers et pour les plus petits par l’AFPA (association française de pédiatrie ambulatoire).

Rassurer les personnels et leur apprendre à communiquer dans ce contexte de crise sanitaire : ni psychose, ni banalisation.

L’école ne peut devenir un nouveau lieu de confinement ni un lieu anxiogène.

Une réflexion plus approfondie, sur les plannings d’activité, la déambulation, doit pouvoir permettre de retrouver les activités normales de l’école. La restauration en dehors de la classe dans ce nouveau protocole va dans notre sens.

Les personnels médicaux sont aussi là pour rassurer les personnels et leur apprendre à communiquer dans ce contexte de crise sanitaire : ni psychose, ni banalisation.

L’angoisse, qui existe chez certains enseignants et élèves, nécessite de répondre aux questionnements de tous et de s’organiser autour de cette question.

La diffusion de tutoriels et de visuels est indispensable pour accompagner les personnels et les enfants, notamment sur la manipulation des masques.

 Conduite à tenir en cas de Covid à l’école…

Le SNAMSPEN a noté le manque de précisions quant à la conduite à tenir en cas de COVID à l’école : quelle articulation des personnels de santé avec les brigades COVID ?

Notre syndicat revendique le fait de situer les médecins au niveau 3 du protocole de traçage, au coté des ARS, à l’identique de ce qui est fait pour les pathologies infectieuses tel méningite et tuberculose.

Niveau 1 : Médecin traitant chez qui les patients sont envoyés en cas de suspicions

Niveau 2 : Brigade COVID :  » personnels médicaux et administratifs relevant des CPAM et de l’échelon local du service médical » qui sera chargé de finaliser la recherche des cas contacts si informations incomplètes et pour leur indiquer les mesures de confinement, la réalisation d’un test, la délivrance d’un arrêt de travail si nécessaire ; dès lors les personnes contactées, donc enregistrées ont accès à un masque et un test gratuit.

Niveau 3 : de l’organisation mise en place sera assuré par les ARS et Santé Publique France, toujours à partir de Contact COVID, pour gérer par exemple les chaines de contamination complexes (débuts de cluster, « patients testés positif dans un foyer, établissement médicosociaux etc. »)

Pour les écoles, l’organisation doit être territorialisée avec un médecin référent…

L’organisation pour les écoles doit-être territorialisée avec un médecin référent, de l’éducation nationale quand il existe, sinon avec un autre médecin du secteur, dans un périmètre défini.

Le rôle du médecin coordinateur local apparaît indispensable pour gérer non pas les personnels mais l’information notamment entre les mairies, l’ARS, les médecins traitants, les familles, et agir dans les situations complexes au côté et en lien avec les brigades COVID.

Il est impensable de faire face à cette épidémie sans que le rôle de chaque personnel du service de santé ne soit connu de tous et sans coordination entre les personnels santé-sociaux, chacun courant dans son propre couloir en ignorant ce que fait l’autre ou ce qu’il va faire !

Les personnels de santé devraient ainsi pouvoir être informés, en même temps que la hiérarchie et conjointement avec elle, de tout cas suspect dans un établissement afin de mettre en place les mesures sanitaires qui s’imposent et faire un suivi de cohorte à la demande des ARS.

Le secret médical doit s’imposer à tous les personnels…

La notion de secret médical, qui s’impose aux personnels médicaux et brigades COVID, doit s’imposer aussi à tous les personnels de l’éducation nationale.

La suspicion d’un cas nécessite une communication interne et externe adaptée dans l’intérêt de la collectivité et de l’individu concerné. 

(Cas d’enfants sans médecin traitant et de secteurs sans assistante sociale ? Enfants et familles successivement renvoyés de l’école vers le médecin traitant, le laboratoire…. Autant de risques de rupture de parcours qui n’ont pas été interrogés lors de cette audience …)

Des réponses rassurantes

Les réponses du ministre au SNAMSPEN et au Sgen-CFDT, sur les points particuliers soulevés, ont vocation à rassurer et à apaiser les personnels médicaux, infirmiers, qui se sont trouvés ignorés durant toute cette période de crise sanitaire, même en se plaçant sur les listes des volontaires à disposition des ARS.

 Le manque de personnels est déploré. Le ministre souhaiterait pourtant des équipes complètes.

Mais il n’y a pas de volonté à nous ignorer : « votre ressenti est vrai », « vous ne devez pas être dans un angle mort mais bien en première ligne », « c’était un crève cœur pour moi de vous voir inemployés » a t il dit. « Il faut que vous m’aidiez à vous aider » a-t-il ajouté…

« Le rôle des personnels de santé est décisif pour le respect des protocoles et l’éducation à la santé renforcée »

Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT et le SNICS ont déploré tous deux la confusion des rôles et l’absence de place pour chaque professionnel : il a été annoncé que le ministère avec la DGRH est en cours d’élaboration de fiches « métier » (kit de rentrée) pour redonner la lisibilité nécessaire aux professionnels santé-sociaux, y compris pour l’action sociale des personnels.

Le Ministre a répondu par ailleurs à des questions précises des organisations syndicales concernant l’activité des personnels santé et sociaux.

Les enfants avec PAI doivent pouvoir rester chez eux s’ils sont fragiles, tout comme les personnels fragiles. La circulaire PAI, travaillée avec les organisations syndicales, a bien vocation à paraître pour la rentrée de septembre.

Le rôle des assistants de service social est majeur pour les élèves décrocheurs.

Le rôle des assistants de service social est majeur quant aux élèves décrocheurs, il faut aller les chercher. La demande faite de télétravail, alors que les syndicats demandent à partager leur travail entre temps de présence et télétravail afin de limiter les déplacements, sera étudiée. Les visites à domicile dans le cadre du travail social doivent pouvoir perdurer avec les précautions sanitaires usuelles, mais il faut penser à la sécurité des personnels. Les lieux pour accueillir les familles dans les établissements dans le cadre du travail social devront être choisis pour respecter les mesures sanitaires notamment si le bureau est trop exiguë.

Le ministère s’est organisé pour faire parvenir à tous les personnels les masques nécessaires y compris donc aux AS dans le cadre de leur rattachement aux DSDEN.

Le ministre confirme l’importance actuelle du rôle des AS sur le premier le 1er degré après le constat fait du manque de personnel et de leur nécessaire déploiement pour assurer les besoins du premier degré.
Le ministre affirme la nécessité de soutenir le premier degré…

Nos collègues infirmières ont insisté sur leur rôle dans l’apprentissage des gestes barrières et dans l’éducation à la santé. A leurs questions concernant la validation des organisations par le CHSCT ou le conseil d’école pour s’assurer de l’hygiène des locaux et des mesures sanitaires, le Ministre a répondu qu’il y avait un travail avec les collectivités qui doit être réalisé et qu’il n’y aurait pas d’ouverture d’école dès lors qu’il y a un problème sur ce sujet.

La question du redéploiement des infirmières du second degré vers le premier degré est soulevée. Il faut que les infirmières restent en lien avec les élèves fragiles des établissements du second degré encore fermés. Le ministre comprend l’importance d’agir dans ce cadre dans le second degré, mais affirme la nécessité de soutenir le premier degré (comme pour les assistants de service social).

Il est fait mention de la nécessité de recréer le collectif de travail grâce aux personnels santé-sociaux en capacité d’écouter les personnels. Les personnels des établissements médico-sociaux, des ITEP, SESSAD, IME reprendront progressivement avec des précisions qui seront apportées dans ce sens à partir du 11 mai permettant de répondre aux questions.

 

Informations générales apportées par le Ministre sur cette période

 Le ministre a tenu aussi à apporter un éclairage sur cette crise sanitaire et ses 4 temps pour l’école : celui du confinement, du déconfinement, des vacances et de la préparation de la rentrée. Tous ces temps doivent être articulés.

La période de déconfinement doit être accompagnée…

Il a évoqué deux mots clés : Progressif (souplesse dans le temps et l’espace) et social (avec un rôle déterminant des assistantes de service social vers les décrocheurs) et trois domaines : sanitaire (rôle des infirmiers et médecins), psychologique (place des psychologues essentiels) et l‘éducation à la santé.

Le temps du confinement aura des répercussions psychosociales, pointées par la FSU : oui, a noté le Ministre, c’est une raison pour laquelle l’école doit rouvrir dès à présent sans attendre Septembre ! …

La période de déconfinement doit être accompagnée : une circulaire est faite en ce sens.

Les protocoles sanitaires ont été élaborés avec le ministère de la santé, ils ne sont pas flexibles et ainsi n’ont pas pu être beaucoup discutés avec les organisations syndicales.

les métiers de la santé sont essentiels…

En revanche les métiers de la santé sont essentiels (notés comme absents des Protocoles sanitaires), il faut travailler ensemble dit le Ministre pour que cela soit lisible sur le terrain et sensibiliser les personnels pour se tourner vers les équipes médicosociales. Le rôle des médecins est important pour faire face aux manifestations d’anxiété et pour l’éducation à la santé. Dans ce cadre, 4 vidéos sont sur le site Eduscol ont été mises à disposition.

Organisation de la prise en charge des élèves après le confinement…

Le ministre a évoqué aussi l’organisation de prise en charge des élèves après la levée du confinement :

  • Approche éducative et pédagogique avec la scolarisation en priorité des CP et CM2 ; des élèves de REP/REP+, et les classes rurales aux effectifs de moins de 15 élèves. Chaque école organise sa rentrée par niveau les groupes multi-niveaux sont possibles, par rotation, par semaine par exemple…Le cadre pédagogique n’est pas de terminer les programmes mais de réaliser un travail personnalisé.
  • Approche sociale et transversale.

Groupes transversaux : il y aura des priorités faites dans l’accueil, enfants handicapés, décrocheurs, enfants de parents qui travaillent, fratrie :

Groupes constitués suivant le choix de la fréquentation de l’école : soit à la maison (instruction à domicile), soit en étude, soit en dispositifs sport/santé ou culture/civisme en lien pour ces 2 dispositifs avec les mairies comme pour le mercredi. Le ministre a précisé que le rôle des personnels de santé sur ces espaces sera important …

Il s’agit donc de 4 espaces possibles et au choix pour retrouver la confiance. Le choix de l’étude seul peut être fait pour les dispositifs fonctionnant déjà à 15 élèves (REP/REP+).

SNAMSPEN Syndicat National des Médecins de Santé Publique de l'Éducation nationale

Bilan du SNAMSPEN/Sgen-CFDT

Au total 

Un ministre à l’écoute, une audience constructive, ayant permis pour les représentants des personnels santé-sociaux de mettre en lumière leurs difficultés de fonctionnement et l’absence de rôle défini dans l’institution pour faire face à cette crise sanitaire.

Le ministre en est conscient, mais ne sait comment remédier à cela, en dehors d’une communication à l’aide de fiches ressources humaines (« Kit de reprise ») pour apporter de la lisibilité sur les professionnels qui devraient bien, il en convient, être en première ligne dans les écoles et établissements.

De nouveau, il va communiquer dans ce sens, mais n’est ce déjà pas trop tard alors même que les recteurs et rectrices ont déjà adressé un courrier aux personnels enseignants et de direction pour cette rentrée scolaire parfois sans un seul mot concernant les personnels santé-sociaux ?

Une inquiétude

En quoi les personnels de santé scolaire sont-ils attendus dans les dispositifs sport/santé et culture/civisme organisés avec les mairies ? Les projets de transferts de la santé scolaire vers les collectivités malgré l’opposition des professionnels concernés pour un tel choix seraient-ils déjà en cours de construction ?

Une revendication

Placés sous la tutelle du Ministère de la Santé et des Solidarités les médecins scolaires pourraient bénéficier d’une vraie reconnaissance pour utiliser leur expertise médicale, tant individuelle que de santé publique, à destination des populations d’élèves, de leurs familles et de l’école.

L’institution ( pas les médecins !) n’a pas su utiliser notre expertise médicale, pendant le temps de confinement. Celle-ci  n’a pas su non plus  la mettre aussi facilement que nécessaire à la disposition de la crise sanitaire au coté des autres médecins du soin et pour des rôles différents.

Force est de constater que ette expertise n’est toujours pas lisible, ni différenciée, ni coordonnée avec les personnels infirmiers par les recteurs inspecteurs, et personnels de direction alors que la menace sanitaire persiste à l’approche de l’ouverture des établissements scolaires et plus encore pour la prochaine rentrée de septembre !

En savoir plus ?

Vous pouvez lire sur notre site académique :

  • Les précédents compte rendus des audiences ministérielles :

Compte rendu du 30 mars

  • Les compte-rendus des CHSCTA

Compte rendu du 30 avril

  • Les compte-rendu des CHSCTSS, destinés au personnel des rectorat et DSDEN

Compte-rendu du 7 mai