L'analyse du la CFDT et du Sgen-CFDT, suite au discours et annonces du Premier ministre sur la réforme des retraites.
Pour la CFDT, la réforme présentée par le premier ministre est insuffisante et injuste. Insuffisante pour ce qui concerne la pénibilité et le niveau de pension minimal pour une carrière complète. Injuste car le gouvernement a aussi fait le choix d’inscrire une mesure paramétrique quasi immédiate : l’instauration d’un âge d’équilibre imposant un allongement de la durée du travail. A vouloir faire, sur le dos des travailleurs, des économies dont le système des retraites n’a pas besoin, le gouvernement plombe sa réforme.
L’instauration dès 2022 pour toutes et tous d’un âge d’équilibre qui allongera la durée du travail pour une retraite pleine aura aussi un impact pour les agents de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la recherche, de la Jeunesse, des Sports et de l’Enseignement agricole public. Cette mesure d’âge, injuste et inutile s’appliquera dès la génération 1960, même avec une carrière complète. Elle frappera tout particulièrement les agents des catégories B et C aux rémunérations déjà faibles et aux carrières peu valorisées. Une partie des catégories A dont les enseignant·es sera également impactée.
Le Sgen-CFDT appelle donc à la grève et à la manifestation le 17 décembre 2019 pour que le gouvernement ouvre des négociations et revoie son projet.
Le Premier ministre s’est voulu rassurant pour les enseignants et les chercheurs. La confirmation d’engagements pris depuis plusieurs mois était nécessaire. Il manque encore trop d’éléments précis pour que les garanties soient suffisantes.
Confirmation d’une revalorisation pour compenser le nouveau mode de calcul des pensions
Le passage à un système universel de retraites impliquera le cumul de droits sous forme de points sur l’ensemble de la carrière. À terme, les pensions ne seront plus calculées sur les 6 derniers mois de la carrière.
Qui est concerné ?
Tous les actifs et toutes les actives né·es depuis 1975 sont concerné·es pour leur carrière après 2025, les droits à la retraite acquis avant sont conservés. Le poids des nouvelles règles de calcul dans la pension totale augmente ainsi progressivement.
Le gouvernement confirme une revalorisation progressive des enseignant·es, chercheuses et chercheurs, afin que chacun·e cumule assez de points sur la deuxième partie de sa carrière et maintienne le niveau de sa pension.
Tous les actifs et toutes les actives né·es depuis 2004 sont directement dans le nouveau système. Le gouvernement confirme une revalorisation dès les débuts de carrière des enseignant·es et chercheuses et chercheurs pour que la réforme n’ait pas d’effet négatif sur les pensions de retraite de ces métiers.
Pour le Sgen-CFDT, en ne parlant explicitement que des enseignants et des chercheurs, le gouvernement semble oublier d’autres agents n’ayant pas assez de primes à intégrer pour acquérir des points et compenser le nouveau mode de calcul des pensions : CPE , PSyEN, enseignants-chercheurs, AESH , agents des catégories B et C mais aussi de catégorie A dans des ministères qui versent des primes parmi les plus faibles. Ce serait inacceptable. Tout le gouvernement doit rapidement clarifier ce point.
Quelles modalités ?
Le Premier ministre ne s’est pas clairement exprimé sur le sujet. Le ministre de l’Éducation nationale évoque une revalorisation par des primes et par le salaire. Bref ce n’est toujours pas clair. Des éléments précis et garantis sont pourtant indispensables alors que la confiance avec les personnels est rompue.
Rien n’a été annoncé sur la durée de la transition pour les générations après 1975. Autre silence problématique.
La revalorisation devrait débuter des 2021. Le Sgen-CFDT demandait que la revalorisation démarre tôt afin de compenser dès maintenant les effets futurs de la réforme et d’engager par ailleurs l’indispensable revalorisation des carrières de l’Education Nationale.
Quel budget ?
Ni le Premier ministre, ni le ministre de l’Éducation nationale n’ont donné des chiffres précisant l’engagement budgétaire. Cet élément est désormais indispensable pour que le gouvernement crédibilise ses engagements.
Pour le Sgen-CFDT, il manque donc encore trop de précisions. S’il y a des confirmations de principe, il n’y a pas d’annonces nouvelles, à part le début de la revalorisation dès 2021 et l’évocation par le ministre de l’Éducation nationale d’une loi de programmation.
Le Sgen-CFDT rappelle ses exigences :
Revalorisation / compensation
Pourquoi faut-il compenser ?
Il faut une revalorisation compensant le nouveau mode de calcul pour tous les agents n’ayant pas assez de primes à intégrer dans le calcul des droits à retraites.
Le Sgen-CFDT affirme que cette nécessaire compensation révèle l’insuffisance de la rémunération de nombreux personnels de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la recherche, de la Jeunesse, des Sports et de l’Enseignement agricole public. Dans de nombreux cas, cela contribue au manque d’attractivité de nos métiers.
Pas de contrepartie
La revalorisation est alors une compensation. Le gouvernement ne peut pas demander de contrepartie aux agents pour activer la revalorisation. Le Sgen-CFDT n’acceptera ni augmentation du temps de travail, ni dégradation des conditions de travail.
Une revalorisation due à toutes et tous
Tout le monde partira à la retraite. La revalorisation doit donc passer par des éléments de rémunération dont bénéficieront tous les agents qui ont besoin d’une compensation de la mise en œuvre du nouveau système. Elle ne peut être conditionnée à l’exercice de certaines fonctions ou à des choix de carrière précis.
Le gouvernement ne répond toujours pas sur des sujets importants que le Sgen-CFDT soulève depuis plusieurs mois :
- nous affirmons que les concertations sectorielles dans les ministères doivent aussi bénéficier aux contractuels
- nous demandons une amélioration des règles de reclassement : il faut cesser de pénaliser celles et ceux qui intègrent un corps de la fonction publique après avoir été agent contractuel ou après une première carrière dans un autre corps de la fonction publique ou dans le secteur privé
- nous demandons un travail de réduction drastique des inégalités femmes-hommes sur tous les éléments de rémunération : il y a urgence à agir tant les primes creusent les inégalités entre femmes et hommes, sauf lorsqu’elles sont forfaitaires et servies à tous,
- nous demandons que nos ministères travaillent dès maintenant à l’aménagement des fins de carrière : les nouveaux droits en la matière doivent être accessibles au plus vite, et en tout état de cause avant 2025,
- nous demandons que nos ministères travaillent dès maintenant sur les enjeux de pénibilité : des personnels sont aussi concernés à l’Éducation nationale, l’Enseignement supérieur et la recherche, la Jeunesse, les Sports et l’enseignement agricole public.
Le Sgen-CFDT demande au gouvernement d’ouvrir des négociations sur l’ensemble de ces sujets, cela suppose :
- un calendrier et une méthode de travail ;
- des thématiques claires ;
- un engagement budgétaire chiffré dans la durée ;
- des hypothèses de revalorisation ;
- une capacité à faire bouger les lignes pour prendre en compte les propositions des syndicats représentatifs au bénéfice des agents.