Déclaration du Bureau national de la CFDT.
Le Bureau national de la CFDT s’est réuni le 16 mars 2023, jour où le Gouvernement a décidé de déclencher le 49.3 pour faire adopter le projet de loi sur la réforme des retraites, sans vote de l’Assemblée nationale. Une telle réforme mérite une autre ambition de la part de l’exécutif que celle d’utiliser tous les artifices pour esquiver le débat de fond.
Pour la CFDT, une réforme du système des retraites ne peut être qu’une réforme porteuse de progrès social, de plus d’égalité, de solidarité et de liberté de choix. La CFDT a toujours revendiqué une transformation profonde de notre système de retraites pour le rendre plus juste et plus lisible. Cette transformation doit partir des réalités du travail et créer de nouveaux droits tout en assurant une pérennité financière en partageant les efforts.
Réussir une telle réforme nécessite de prendre le temps de l’écoute et de la concertation, pour rechercher un compromis social qui tienne compte de la réalité des travailleurs et des travailleuses dans toute sa diversité et de l’expression des citoyennes et citoyens.
C’est l’exact inverse de ce que le Gouvernement a fait depuis septembre 2022. Certes, la CFDT a réussi à arracher une concertation dont le bilan est insuffisant. Nous avons réussi à faire émerger des sujets importants : la situation des femmes, le minimum de pension, les carrières longues, la pénibilité ou encore l’emploi des seniors. Mais le principe du recul de l’âge légal de départ, pilier de la réforme, n’a jamais pu être discuté.
Durant ces concertations, aucune des pistes alternatives de financement portées par la CFDT n’a été sérieusement étudiée, aucune contribution n’a été demandée aux employeurs. Seuls les travailleurs et travailleuses sont mis à contribution, les plus gros efforts pesant sur les épaules de ceux et celles qui ont commencé à travailler tôt, qui exercent des métiers pénibles, les mêmes que l’on applaudissait pendant la crise Covid.
En inscrivant ce projet dans le cadre d’une loi de financement rectificative de la Sécurité sociale, le Président de la République et son Gouvernement ont affiché clairement leur unique objectif : faire des économies budgétaires. Le Gouvernement a cherché un compromis politique à tout prix. Une stratégie qui l’a poussé à ignorer, une fois de plus, la démocratie sociale.
C’est pourquoi, depuis deux mois et demi, la CFDT s’oppose à ce projet de réforme des retraites. Cette opposition est résolue, argumentée, responsable. Elle s’exprime dans un cadre unitaire intersyndical clair dans son mot d’ordre et dans ses modalités d’actions.
Cette opposition est largement suivie par les travailleurs et travailleuses, et par une large majorité des citoyennes et citoyens. Elle s’est exprimée au cours de 8 journées de mobilisation, lors desquelles plus de 12 millions de travailleurs et travailleuses ont protesté pacifiquement contre le projet gouvernemental. C’est le plus important mouvement social que le pays ait connu depuis 50 ans, réunissant – et c’est à noter- des travailleurs et des travailleuses de toutes les professions et de tous les territoires.
La pétition intersyndicale a aussi recueilli plus d’un million de signatures. Pour la CFDT, la légitimité démocratique ne se limite pas aux résultats des élections et à la légitimité du vote. Elle se construit aussi à l’épreuve de l’exercice du pouvoir, dans la capacité à comprendre l’état du pays, à tenir compte de l’opinion et des corps intermédiaires.
L’absence de toute réponse de l’exécutif face à cette expression citoyenne, vécue comme un mépris, a progressivement transformé la contestation en ressentiment, voire en colère.
La surdité et l’entêtement de l’exécutif se sont poursuivis jusqu’à l’utilisation du 49.3.
C’est le choix du passage en force et l’aveu d’une absence de majorité politique. Rejeté par l’opinion publique, combattu par le plus fort mouvement social de ces dernières décennies, sans majorité à l’Assemblée nationale, le report de l’âge légal à 64 ans ne peut plus être mis en œuvre. Le Bureau national de la CFDT demande solennellement au Gouvernement de retirer son projet de réforme des retraites.
La CFDT continuera d’agir et de se mobiliser pour faire en sorte que cette réforme ne soit pas adoptée. Nous appelons donc tous les travailleurs et toutes les travailleuses à participer à des rassemblements syndicaux sur leurs territoires ce week-end, dans le respect des biens et des personnes, en toute indépendance des partis politiques.
La CFDT appelle à une 9 ème grande journée de mobilisation le 23 mars. Nous soutenons par ailleurs l’initiative prise par des parlementaires de mettre en œuvre un référendum d’initiative partagée.
Au-delà du sujet des retraites, le Bureau national de la CFDT lance un appel solennel : nous courons un vrai risque démocratique qui peut faire le jeu des extrêmes. Notre démocratie était déjà fragile, elle est maintenant ébranlée. La CFDT appelle à l’apaisement et à une meilleure articulation entre démocratie politique et démocratie sociale. L’exécutif, après avoir retiré sa réforme, doit organiser une conférence sociale sur le travail.
Enfin le Bureau national de la CFDT assure aux travailleurs et travailleuses qui ont soutenu la mobilisation ces dernières semaines, que la CFDT continuera de les défendre résolument. Nous ne cèderons jamais à la violence. Nous continuerons de faire connaitre les réalités du travail. Nous continuerons de donner de la voix aux « travailleurs et travailleuses de la deuxième ligne ». Nous continuerons de nous engager pour construire du progrès social et améliorer la situation de tous et toutes.